Toutes blessent, la dernière tue
« Toutes blessent, la dernière tue » de Karine Giebel, éditions Belfond
Cela faisait un bon moment que j’avais entendu parler de cet auteur, et quand j’ai croisé ce titre à la médiathèque, je l’ai tout de suite emprunté !
Mais en lisant le résumé, je ne m’attendais pas à avoir un tel choc avec une plongée dans l’horreur, hélas ordinaire, mais souvent invisible.
Le roman alterne entre le récit de Tama, petite fille arrachée à son pays pour devenir esclave, et celui de Gabriel, qui traque et tue des personnes, et va avoir la surprise de trouver chez lui une jeune inconnue, blessée et amnésique. Puis on entendra ensuite la voix de cette inconnue et celle d’un jeune homme, Izri.
Tama est obligée de quitter le Maroc à huit ans, emmenée par une dame qui a promis à son père qu’en France elle aurait une belle vie, irait à l’école. Mais ce n’est pas du tout le cas, Tama se retrouve dans une famille dans un pavillon de banlieue, enfermée dans la buanderie, et esclave de la famille, levée tôt, s’occupant de tout jusqu’à tard, sans repos, et avec de mauvais traitements. Seul petit échapatoire, s’évader grâce à la lecture, ayant réussi à apprendre à lire seule, avec les livres de la famille. Tout va empirer, et les tentatives et révoltes de Tama pour échapper à cet horrible destin se retournent contre elle. Physiquement, son corps va subir les pires avanies, brûlures, coups, manque de nourriture, attouchements, viols. Quand elle a un peu d’espoir, le destin se charge rapidement de le lui enlever. Elle aura droit à quelques moments de bonheurs, mais toujours le destin se joue d’elle, de ses sentiments.
Gabriel, la cinquantaine, est un assassin et tue méthodiquement des personnes, celles qui sont restées passives face au viol et au meurtre de sa fille. Depuis, il ne vit que par et pour la vengeance. Mais l’arrivé de l’inconnue blessée et amnésique va bouleverser sa vie.
Plus le récit progresse, plus les chapitres se rapprochent du moment présent, et l’inéluctable engrenage de violence se poursuit.
On sent qu’il est important et vital que l’inconnue retrouve ses souvenirs, car la vie d’autres personnes est en jeu.
Ce roman va vraiment au bout de l’horreur et ne nous épargne rien, montrant l’horrible visage de l’esclavage moderne, les sévices physiques et psychologiques subis, les viols, la torture, le tout bien caché au reste du monde.
Une plongée dans l’horreur à l’état pur, vécue hélas par de nombreuses jeunes filles, vendues par leurs parents pensant qu’elles auraient une vie meilleure, et montrant le cercle sans fin de la violence.
Un roman intense et bouleversant.
Un extrait :
A chaque livre, j’ai l’impression qu’une porte s’ouvre quelque part dans ma tête. Les verrous cèdent, les uns après les autres. Un livre, c’est comme un voyage, dans l’espace ou le temps. Dans l’âme des hommes, dans la lumière ou les ténèbres.
Avec ce roman, je participe au challenge de Dasola sur les épais de l'été 2023 : http://dasola.canalblog.com/archives/2023/06/10/39921971.html